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Un cycliste tué à Paris. Un seul, pas 20, ni 100 ni 500

Les accidents mortels à vélo sont rares

Le Monde, 12 octobre 2012

Par Olivier Razemon

Vélo-interdit-Paris-1-300x224 Un homme circulant sur un Vélib a été renversé ce jeudi 11 octobre par un camion dans le 17ème arrondissement de la capitale

D'après les services de police,  le cycliste roulait dans la même direction que le poids-lourd. Comme l'explique parfaitement, le chauffeur a tourné à droite au feu vert, sans apercevoir le vélo, qui se trouvait sur la chaussée, le long du trottoir.

Le chauffeur a expliqué à la police qu'il n'a   "pas vu"   l'homme à vélo. La visibilité, en effet, en matière de vélo urbain, est un élément essentiel. La visibilité des cyclistes. MAis aussi la visibilité du vélo comme mode de déplacement.  Le chauffeur n'a sans doute pas imaginé qu'on pouvait circuler à bicyclette dans Paris. Ou alors pas si près de son camion. S'il y avait davantage de cyclistes dans la capitale, les conducteurs de véhicules motorisés se prépareraient peut-être à les croiser, à penser leurs mouvements en fonction d'autres usagers de la voirie. 

 

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Au bistrot.  L'accident va à coup sûr alimenter les conversations.  "Encore un  cycliste tué" ,  "le vélo c'est dangereux" ,  "mais que font tous ces gens à vélo sur la chaussée réservée aux voitures" . Ces propos, je les ai déjà entendus, comme vous, sans doute. Il suffit pour cela de tendre l'oreille dans un bistrot à l'heure du café. Inévitablement, la conversation dévie alors sur la dangerosité supposée du vélo. 

Et là, chacun avance ses chiffres. Faites le test, je le fais régulièrement, auprès d'amis, de connaissances ou d'interlocuteurs. Combien y a-t-il de cyclistes tués chaque année à Paris ?  "20" , m'a répondu hier matin, place d'Italie, le responsable d'une société de transport.  "500" m'a lâché avant-hier une écrivaine, dans le 5ème arrondissement.  "100"  me disait la semaine dernière un membre de ma famille, à Lyon.  "30" ,  "100" ,  "1000" , m'annonçaient le lundi précédent des étudiants de l'Université d'Aix-en-Provence où j'étais allé délivrer un cours.

 

IMG 3620-300x225Tout faux.   La bonne réponse est : "entre 0 et 6" . Parmi les journaux relatant l'accident mortel de jeudi,  seul Libération   a eu l'idée de rappeler que "ce genre d'accidents est assez rare dans la capitale" . En 2008, comme la préfecture de Police de Paris l'a indiqué jeudi dans un communiqué à l'AFP, 5 cyclistes ont trouvé la mort. Ils étaient 6 en 2009 et 2 en 2010. C'est trois fois moins que le nombre de piétons tués et que le nombre de motards décédés, environ 18 pour chacune de ces catégories. En 2011, enfin, il n'y a eu aucun cycliste tué à Paris, indiquent, de concert, la  Fédération des usagers de la bicyclette   (FUB) et la Préfecture de police. En 2012, on en compte en revanche déjà plusieurs, dont celui de ce jeudi, mais la police dit   "ne pas disposer encore de statistiques" . Un dernier chiffre : en France, on compte chaque année environ 150 cyclistes tués sur la route, sur environ  3900 victimes. 85% de ces personnes sont fauchées sur les routes de campagne par des conducteurs qui, probablement ne les ont "pas vus". C'est ce qui est arrivé dimanche 7 octobre, en Savoie, à  Gilles Boisvert, militant du vélo, tué par le conducteur d'une Porsche qui ne maîtrisait pas son véhicule.
Cette comptabilité macabre n'enlève rien à la douleur provoquée par le drame d'hier et celui de dimanche dernier. Mais elle permet de relativiser amplement le propos de ceux qui proclament partout que "le vélo en ville, c'est très dangereux" et aimeraient réserver la voirie aux seuls véhicules motorisés. Qui, évidemment, ne sont pas du tout dangereux...
 
 
 
NB2 : en fait, pour accroître son espérance de vie, il vaut mieux faire régulièrement du vélo que ne pas en faire. "Ne pas faire de vélo, c’est dangereux pour la santé".
 
Pour en finir avec les idées reçues, suite. 13 octobre, 14h30. Je lis dans les commentaires que l'argumentation serait "malhonnête", qu'il faudrait prendre en compte le nombre de blessés. Banco. En 2009, à Paris, les 6 cyclistes tués (c'est le maximum depuis au moins 5 ans) représentaient 13,6% des personnes décédées dans la circulation. 552 cyclistes étaient blessés cette année-là, soit 6,5% du total des blessés. Et parmi eux, 40 avaient subi des blessures graves, soit 5,5% du total des blessés graves. A titre de comparaison, les personnes circulant sur les deux-roues motorisés constituaient respectivement 43,2% des tués (19), 53,8% des blessés (4539) et 55,4% (400) des blessés graves. Le danger est donc surtout dans les têtes.