Le clou du spectacle
La série « encore raté #XXX » a connu de nombreux épisodes. Pour refermer la décennie passée, nous vous révélons LE raté qui fera date dans les annales marseillaises, celui dont on dira pendant très, très longtemps : « mais comment on a pu laisser faire cela ? » Et bien justement on vous explique comment !
Comment, en effet, le cours Lieutaud,
une voie de 20 mètres de large (à l’endroit le plus étroit), traversant le cœur de la deuxième ville de France peut-elle être aussi mal ré-aménagée pour les modes actifs (piéton et vélo) en 2020 ? En tout cas sur une moitié bien précise.
Comment peut-on se retrouver avec une piste cyclable qui passe entre la publicité et une terrasse ne laissant aucune place aux piétons et apportant donc autant d’inconfort pour ces derniers que pour les cyclistes ?
Comment le Collectif Vélos en Ville a-t-il pu laisser faire cela ? Et bien, à vrai dire, il ne l’a pas laissé faire mais il est parfois bien impuissant face aux inerties combinées de l’aménageur et des élu.e.s. Sans compter sur les forces opérant dans l’ombre, en dehors de toutes réunions.
Il est peut-être temps à l’aube de cette nouvelle décennie, d’indiquer au lecteur que son association participe régulièrement à de nombreuses réunions avec, entre autres les aménageurs (métropole, Soleam, Euromed,etc.) et les élu.e.s. Nous le disons rarement, mais c’est une réalité. Mais une réalité qui a connu bien des vicissitudes au cours des mandats.
Ces réunions allaient bon train à la fin des années 2000 grâce au dynamisme et à la ténacité de votre association qui avait alors réussi un tour de force : rencontrer (enfin) les services de la métropole. Elle avait été aidée alors par le vice-président alors en place à la métropole : Pierre Sémériva. Puis ces réunions allaient évoluer avec la tenue régulière de comités de pilotage du Schéma Directeur des Modes Doux de juillet 2010 à décembre 2013. Puis, vint 2014 et ses élections qui jetteront un grand froid sur les relations et l’arrêt total du Schéma Directeur des Modes Doux, même si le vice-président Robert Assante tentera d’arrondir les angles. Il faudra attendre que la nouvelle métropole AMPM prennent ses marques, soit 1,5 an après sa constitution, avec un nouveau vice-président très occupé, Jean-Pierre Serrus et surtout avec l’arrivée de sa nouvelle présidente, Martine Vassal, qui permettra la reprise de réunions régulières avec différents services de la métropole qui déboucheront, entre autre, sur la réalisation de la piste cyclable de la Corniche.
En revanche, pour certains aménagements ou plutôt avec certains aménageurs (de la métropole ou d’ailleurs), ce n’est pas toujours l’idylle et il faut savoir parfois forcer la main pour être entendu. Et parfois, c'est tout le temps.
Genèse du Cours Lieutaud2014,
nous et d’autres faisions le constat que les usages de cette rue sont dépassés.
2015, le projet de rénovation est adopté.
Juillet 2016 l’appel d’offre est publié.
Septembre 2016 l’AGAM sort un
document de préfiguration intitulé « Enjeux et orientations pour une requalification de l’axe » de très bonne facture.
6 février 2017, le collectif envoie un courrier à la métropole pour leur signaler qu’il est nécessaire de conserver l’aménagement cyclable sur la totalité de la longueur de la voirie, c’est-à-dire avec le Cours Garibaldi.
26 septembre 2017 :
TANGRAM remporte le concours. 2018 : Le Collectif Vélos en Ville demande à pouvoir consulter les plans de rénovation.
Cela sent l’embrouille23 avril 2018 le collectif envoie une lettre officielle à la présidente de la métropole pour obtenir les plans d’aménagement du Cours Lieutaud. Des plans qui mettront bien longtemps à nous parvenir, tant l’envie de nous les partager est grande…
Octobre 2018, l’association obtient les plans mais quelque chose semble clocher…
On y observe un changement de profil de la piste cyclable : de la Canebière à la rue des Bergers (Bd Salavator) est aménagée une piste cyclable bilatérale (c’est-à-dire de chaque côté de la rue) selon les standards en centre ville urbain, puis de la rue des bergers au boulevard Baille, on trouve une piste cyclable bidirectionnelle que l’on réserve plutôt habituellement pour les périphéries. Mais pourquoi donc un tel choix ? Pourquoi au droit de la rue des bergers r les cyclistes en direction du boulevard Baille doivent-ils changer de côté pour pouvoir continuer leur itinéraire, au lieu d’aller tout droit ? Connaissant bien le lieu, les bénévoles en charge commencent à avoir des soupçons. Puis une ou deux réunions se passent sans que nous puissions avoir de réponse claire à cette question.
18 décembre 2018 donc, l’association envoie une nouvelle lettre au directeur général de la métropole, afin de connaître les raisons de ces choix d’aménagements pénalisants pour les cyclistes.
Circuler, il y a rien à voir
24 janvier 2019, le collectif reçoit une réponse incroyablement rapide. En une phrase il est dit : « la présence de réseaux structurants contraignants (avec le « s » dans le courrier) la position des alignements arbres a conduit à... »
Puis durant toute l’année 2019, l’association n’aura de cesse de comprendre ce qu’est ce « réseau structurant ». On attend encore. En revanche, lors d’une réunion, sur un autre sujet, avec la métropole et le bureau TANGRAM, l’association a demandé des explications et on nous a indiqué qu’il n’y avait tout simplement pas la place grâce à des diapositives Power Point. À ce moment-là il n’y a plus de réseaux structurants.
Mais à bien y regarder, les yeux de lynx de l’association se sont bien rendu compte que la place ne manquait pas sur l'une de ces 80 diapos passées à la vitesse de l'éclair, mais que celle-ci était en revanche occupée par… des occupations temporaires de l’espace public, obtenues grâce à des
Autorisations du même nom (AOT). Mais si ces autorisations sont temporaires, n’est-ce pas l’occasion de les remettre en question lors de travaux de rénovation visant justement à apaiser la circulation ? La circulation efficace des modes actifs, les plus vertueux de tous, ne devrait-elle pas être la priorité numéro une, avant celle des voitures et d’autorisation d’occupation de l’espace public, quelle qu'en soit la raison ?
Chères et chers cyclistes, si demain vous devez, monter sur un trottoir qui n'aura pas la largeur réglementaire, dans un virage, vous arrêter aux feux tricolores piéton, puis tourner à gauche et aller de l’autre côté du cours Lieutaud, au lieu d’aller tout droit, comme les voitures et les motos, vous serrez heureux d’apprendre que c’est à cause d’une occupation temporaire de l’espace public pour des expositions permanentes de voitures, scotters et autres Harley Davidson (entre autre) sur les trottoirs !
A moins que ce ne soit pour préserver ce monument historique d’un siècle révolu : la pompe à essence marseillaise, qui trouvera bientôt sa place dans les meilleurs guides touristiques tant son charme suranné, n'a d'égal que que l'incongruité de son emplacement.Sans doute un bail emphytéotique, dont seul Marseille a le secret...
Et à la fois, quand on voit
les images de TANGRAM, on ne peut pas dire qu’ils faisaient de la pubilicté mensongère : motos japonaises à droite et Harley Davidson à gauche avaient bien droit de cité sur les trottoirs.
Et ailleurs, ils font peut être mieux alors ?
Nous les entendons déjà, ces remarques, qui ne s’exprimeront sans doute pas sur les réseaux sociaux ou dans les réunions bipartites, pour ne pas alimenter la polémique : "Et ailleurs, ils font peut être mieux alors? Si ils croient que c’est facile d’aménager une rue !"
Nous sommes bien conscient qu’aménager une rue n’a rien de facile, et certains de nos bénévoles ont d’ailleurs suffisamment de compétences pour discuter d’égal à égal sur ces sujets avec les aménageurs. Mais la principale difficulté n’est pas technique, sinon ce genre d’aménagement aberrant ne se trouverait pas qu’à Marseille, mais également dans d'autres villes. Sauf que nous, on a le clientélisme...
Pourquoi, par exemple,
la rue de Rivoli récemment aménagée à Paris et qui n’est pourtant pas plus large que le cours Lieutaud et pas moins convoitée par les voitures, arrive quant a elle à obtenir un bon niveau de cyclabilité sans impacter les piétons ? La rue de Turbigo aménagée encore plus récemment (photo ci-contre), n’est pourtant pas aussi large que le Cours Lieutaud, mais ne rogne pas l’espce des piétons ? Ou encore la rue Lafayette aménagée déjà il y a fort longtemps et ayant gardé, elle, une voie de circulation réservée pour les bus à la place de notre alignement d’arbres, et arrive tout de même à conserver des aménagements cyclables. A paris mais aussi à
Nantes, Bordeaux, Strasbourg, Grenoble, partout.
Mais effectivement sur ces photos on ne voit pas l’ombre d’une Harley Davidson…
A vois de vous faire votre avis...
Bonus photos du 8 janvier 2020 :
L'exposition continue :
Sponsor de l'exposition :
Essaim de scotters :
Un monsieur peut cacher une voiture...
Euh, c'était pas possible de décaler un peu les armoires grises sur la gauche ? Je sais bien que les scooters vont s'y garrer mais bon...
On a retrouvé l'ancêtre de R2D2 :